DJIBOUTI, 7 décembre 2025 (#ADI) –
C’est une petite révolution silencieuse qui s’est opérée ce dimanche dans les salles de classe des régions de l’intérieur. Loin des projecteurs de la capitale, une vague de solidarité venue de la Méditerranée a déferlé sur les lycées d’Obock, d’As-Eyla, d’Ali Addé, de Holl-Holl, de Damerjog et de Randa. L’Association Sud de France–Djibouti (ASFD), une jeune structure dynamique basée à Marseille, a procédé à la distribution de 125 calculatrices graphiques de dernière génération aux élèves de Terminale Scientifique.
Plus qu’un simple don matériel, cette initiative, menée en étroite coordination avec le ministère de l’Éducation nationale et de la Formation professionnelle (MENFOP), pose la première pierre d’un nouveau pacte entre la diaspora et la jeunesse djiboutienne : celui de l’excellence pour tous, où que l’on vive.
Un outil décisif pour l’égalité des chances
Créée en mai 2025, l’ASFD a fait le pari de l’efficacité immédiate. Pas de discours fleuves, mais du concret. Pourquoi des calculatrices graphiques ? Le choix est stratégique. Dans les filières scientifiques, la maîtrise de ces outils (type TI-Nspire ou Casio Graph) est devenue indispensable pour traiter les programmes de mathématiques et de physique-chimie.
Pour les familles des zones rurales, l’acquisition de ce matériel représente souvent un coût prohibitif, créant de facto une rupture d’égalité face aux élèves de la capitale mieux équipés. En comblant ce fossé, l’ASFD offre aux lycéens de l’intérieur les mêmes armes pour affronter le Baccalauréat.
« C’est un soulagement immense et un boost de motivation incroyable », confie Ahmed, élève en Terminale S au lycée d’Obock, les yeux rivés sur son nouvel outil. « Avant, on devait se prêter les calculatrices ou faire des approximations. Grâce à ce don, je pourrai enfin visualiser les courbes, analyser les fonctions et gagner un temps précieux le jour de l’examen. C’est un vrai “game changer” pour mon Bac ! »
L’impact de cet équipement n’est plus à prouver. Le président de l’ASFD rappelle l’exemple probant du lycée de Mouloud qui, après avoir équipé ses élèves de manière similaire, a vu son taux de réussite bondir, se hissant parmi les meilleurs du pays malgré des effectifs réduits. « Si cela a marché à Mouloud, cela marchera à Randa et à Ali Addé », assure-t-il avec conviction.
Une chaîne de solidarité exemplaire
La réussite de cette opération “commando” repose sur une synergie inédite entre la société civile à l’étranger et les institutions nationales. Loin des lourdeurs administratives parfois redoutées, l’ASFD a bénéficié d’un “tapis rouge” institutionnel.
Le MENFOP a joué un rôle clé en ciblant les besoins et en assurant la logistique vers les zones reculées. De leur côté, les services des douanes ont facilité le dédouanement, prouvant que l’État est prêt à accompagner toutes les bonnes volontés.
Lors d’une cérémonie symbolique, un haut responsable du MENFOP a tenu à saluer ce geste : « Cette donation renforce notre mission d’inclusion éducative. L’État investit massivement dans les infrastructures, mais l’apport de la diaspora sur des équipements de pointe comme ces calculatrices est un accélérateur formidable. C’est le modèle de partenariat que nous appelons de nos vœux. »
Cette dynamique a également été saluée au plus haut niveau diplomatique. Lors de son séjour, le président de l’ASFD a été reçu par Mme Ayane Said Yassin, directrice des Affaires consulaires au ministère des Affaires étrangères. L’entretien a permis d’esquisser les contours d’une coopération pérenne, visant à transformer ces actions ponctuelles en véritables ponts de développement entre la France et Djibouti.
Diaspora : Le temps de l’action a sonné
Si l’ASFD a réussi ce tour de force en quelques mois d’existence, c’est la preuve que le modèle associatif de la diaspora est en pleine mutation. Fini le temps des simples transferts d’argent intrafamiliaux ; l’heure est à l’investissement social structuré.
Ce geste s’inscrit dans une lignée d’initiatives inspirantes. On se souvient de l’Association Jibril Europe–Djibouti qui, en 2022, avait inondé le lycée d’Arta de 500 manuels scientifiques, ou encore du collectif “Tech4Djibouti” au Canada, qui a initié les enseignants d’Ali Sabieh à la robotique en 2023.
Mais l’ASFD va plus loin en lançant un appel vibrant aux autres communautés djiboutiennes à travers le monde.
« Nous avons montré que c’est possible, rapide et impactant », déclare le président de l’association. « À Paris, Bruxelles, Londres, Montréal, Dubaï ou Ottawa, il existe des milliers de Djiboutiens qui ont réussi et qui veulent redonner. Ne vous demandez pas par où commencer : copiez ce modèle ! Parrainez un laboratoire de sciences, financez des ordinateurs pour une bibliothèque, équipez un club de maths. Les besoins sont identifiés, les canaux sont ouverts. Il ne manque que votre volonté. »
Vers un mentorat 2.0
L’ambition de l’ASFD ne s’arrête pas à la distribution de matériel. L’association voit grand et vise loin. Dès la rentrée 2026, un programme de mentorat à distance sera mis en place. L’idée ? Connecter ces lycéens de l’intérieur avec des ingénieurs, des médecins et des chercheurs de la diaspora via des plateformes numériques.
« La calculatrice est l’outil, le mentorat sera la boussole », explique l’équipe marseillaise. Il s’agit de transmettre non seulement du savoir, mais de l’ambition, des codes et de la confiance.
En ce 7 décembre 2025, 125 élèves sont rentrés chez eux avec une calculatrice graphique dans leur sac. Mais ils transportent bien plus que cela : la certitude que, même à des milliers de kilomètres, leurs aînés croient en eux. À la diaspora djiboutienne désormais de relever le gant et de multiplier ces lumières d’espoir à travers tout le pays.
Le message est lancé : qui sera la prochaine association à prendre le relais ?





